Introduction
La notion d’allergie aux implants orthopédiques ou « allergie aux métaux » est une hypersensibilité retardée de type IV. Elle se caractérise par l’activation des Lymphocytes T via un antigène, qui libèrent massivement des cytokines et favorise la résorption osseuse. Initialement décrite dans le domaine dentaire ou la chirurgie cardiothoracique, ce type de réaction est de plus en plus décrite en chirurgie orthopédique notamment chez nos confrères allemands qui retrouvent un taux de réaction allergique de 1 à 5% suivant la mise en place d’implants orthopédiques.
Environ 10 à 15% de la population présente une hypersensibilité cutanée aux métaux. Le Nickel est le métal le plus allergène, suivi par le Chrome et le Cobalt.
On estime que 20 à 25% des patients présentent une sensibilité aux métaux après arthroplastie. Cependant, seule une faible proportion d’entre eux développeront des symptômes. De plus, le taux d’échec d’une arthroplastie est plus élevé chez des patients présentant déjà une hypersensibilité aux métaux.
Dans quelle situation évoque-t-on cette hypersensibilité aux métaux et quelle est la prise en charge diagnostique et thérapeutique ?
Matériaux Orthopédiques
Les matériaux utilisés en orthopédie doivent répondre à un certain cahier des charges : la biocompatibilité, une résistance suffisante aux contraintes, et être si possible inerte.
La plupart des implants orthopédiques posés en première intention sont constitués de Chrome et de Cobalt. Le matériel d’ostéosynthèse (plaques, cerclages, broches) est quant à lui, composé en grande majorité d’acier inoxydable (Fer, Chrome, Nickel). Ils sont donc susceptibles d’induire une réaction d’hypersensibilité aux métaux.
N’étant pas composés de métaux dits « allergènes », Les implants en titane sont considérés comme hypoallergénique, mais leur coût de fabrication est souvent plus élevé et leur pose est moins fréquente.
Métallose ou Hypersensibilité aux métaux ?
La métallose est à différencier de l’hypersensibilité aux métaux. En effet, il s’agit d’une réaction liée à la libération massive d’ions métalliques d’un couple de frottement métal-métal qui active les monocytes et les macrophages (immunité innée) et entraîne une cascade inflammatoire massive responsable d’une ostéolyse, d’un descellement d’implant et de pseudotumeur.
Quand suspecter une hypersensibilité aux métaux ?
Une hypersensibilité aux métaux se manifeste généralement par des douleurs, un épanchement intra-articulaire, un retard de cicatrisation, et une dermite allergique (localisée ou généralisée). Dans des formes avancées, certains implants peuvent même se desceller.
Devant ces symptômes, le diagnostic d’hypersensibilité aux métaux reste un diagnostic d’exclusion. Le bilan cherche dans un premier temps à éliminer une infection, une fracture péri-prothétique, l’usure des implants ou un vice de positionnement de la prothèse. En France, 10 % des arthroplasties sont des reprises chirurgicales. Parmi ces patients, la proportion des patients présentant une hypersensibilité aux métaux reste inconnue.
Certains facteurs de risque prédisposent à une hypersensibilité aux métaux : les sujets féminins du fait d’une exposition plus importante à ces métaux présents dans les bijoux fantaisies, les personnes atopiques présentant déjà un eczéma, les sujets travaillant dans la métallurgie, les piercings…
La Société Française de la Hanche et du Genou (SFHG) propose un auto-questionnaire sur son site internet pour aider les praticiens à dépister cette complication. Il est consultable en cliquant sur le lien ci-dessous.
Que faire en cas de suspicion d’hypersensibilité aux métaux ?
Il est recommandé de réaliser dans un premier temps des radiographies standards, un scanner, une scintigraphie osseuse et un bilan sanguin avec au minimum une Numération Formule Sanguine (NFS) et une CRP pour éliminer les complications les plus fréquentes des arthroplasties.
Dans un second temps, une ponction articulaire au bloc opératoire sous asepsie stricte est indiquée avec une analyse bactériologique et histologique. Cependant, elle ne permet pas de confirmer le diagnostic d’hypersensibilité aux métaux car aucun marqueur cytologique n’est spécifique à ce type de réaction.
A ce stade de la prise en charge et en l’absence de diagnostic évident, la recherche d’une hyper-sensibilité aux métaux doit être effectuée. Le patient sera alors adressé vers une équipe spécialisée pour effectuer des tests plus approfondis tel que les patch-tests à la recherche d’une hypersensibilité cutanée aux métaux les plus allergènes ou des tests in vitro : test de transformation des lymphocytes (LTT), MELISA®.... Ces tests ont une sensibilité correcte mais leur spécificité est médiocre.
Le diagnostic d’hypersensibilité repose donc sur un faisceau d’arguments (anamnèse, terrain atopique, signes cliniques, élimination des diagnostics différentiels, patch-test et LTT). En cas de forte suspicion d’allergie aux implants, le chirurgien orthopédique sera amené à reposer une prothèse hypoallergénique. Ces implants sont généralement plus coûteux et ne sont pas recommandés en première intention.
Conclusion
L’hypersensibilité aux métaux est un diagnostic difficile à confirmer et repose sur un faisceau d’argument car les signes cliniques et les examens complémentaires sont peu spécifiques. Il reste un diagnostic d’exclusion après avoir éliminé les diagnostics différentiels : infections d’implants, descellement, instabilité, fracture péri-prothétique, et les vices d’implantation. La mise en place d’implants hypoallergéniques est recommandée uniquement en cas d’allergie diagnostiquée avant la pose.